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Coparentalité, autorité parentale, intérêt de l’enfant, etc. Nous avons déjà vu et entendus tous ces termes juridiques. Mais pour autant, savons-nous concrètement ce qu’ils impliquent pour les parents, notamment après une séparation ? Essayons de les définir et les comprendre.

 

La responsabilité parentale définie par la loi sur l’autorité parentale

La loi n°2002-305 du 4 mars 2002 a remanié l’article 371-1 du Code civil en disposant que « L’autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant ». Elle appartient au père et à la mère jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé, et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne. Les parents associent l’enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité ».

Il faut relever deux notions importantes. En premier lieu celle que les parents prennent des décisions ENSEMBLES et en deuxième lieu, dans l’INTERET de l’enfant.

Ne nous le cachons pas, élever un enfant est difficile. Les parents traversent un long chemin jalonné de difficultés successives. Celles-ci sont variables en fonction de l’âge de l’enfant et la situation des parents. L’intérêt premier des parents est alors de toujours tendre à accompagner leur enfant dans l’apprentissage de l’autonomie. Pour cela, ils lui assurent les soins et l’attention indispensable à sa construction personnelle. En tout instant, les enfants ont besoin que les parents restent garants de toute décision les concernant et ce quels que soient les aléas de leurs vies personnelles et conjugales.

En effet, un jeune en devenir ne doit pas assumer seul des choix et des décisions dont l’enjeu dépasse son niveau de maturité. Il a le droit à son innocence ! C’est la responsabilité parentale que de répondre aux besoins de l’enfant pour toutes questions importantes.

C’est Le rôle des parents que de confronter progressivement l’enfant à la responsabilité de ses actes et ses paroles (l’évolution s’entendant sur plusieurs années). Pour devenir adulte, il a besoin de l’insouciance de son enfance, de ses périodes de dépendances, de son adolescence et de ses oppositions maturantes. Elles lui serviront de ressources quand il sera adulte. Il doit pouvoir faire l’expérience du mal-agir et d’en apprendre les conséquences (dans la mesure de son âge).

Les ruptures conjugales ne doivent pas conduire à une dilution ou une dissolution des responsabilités parentales communes. Ce que les parents faisaient ensembles dans l’intérêt de l’enfant doit perdurer : « le drame ne vient pas tant de la séparation elle-même que de la démission qui peut s’en déduire de la part de l’un ou l’autre des parents. La responsabilité d’un enfant est sans doute la plus importante qu’un homme ou une femme puisse avoir dans l’existence ».

Séparation entrainant une brisure de l’équipe parentale

Chaque jour les juges aux affaires familiales constatent les ravages sur les enfants des séparations conflictuelles des parents. Dans cette guerre parentale, il est trop souvent oublié, déformé, la notion de l’intérêt de l’enfant. Rappelez-vous : l’enfant a besoin de vivre son enfance insouciante pour se construire. Il a besoin d’être à l’abri du conflit de ses parents.

Nombreux sont les besoins de l’enfant, ils se traduisent par des actes concrets que les deux parents doivent mettre en œuvre. Il est fondamental que les parents continuent ce travail d’équipe au-delà de la séparation. Malgré toutes les difficultés et émotions douloureuses qu’ils vivent… Nous devons agir en parents responsables.

J’ai envie de vous proposer : « Quelques lignes en introduction du roman magnifique et dramatique de Jean-Denis Bredin, Membre de l’Académie Française : « L’enfant sage », qui dresse le tableau d’un enfant de 12 ans dans cette situation : pris entre un père et une mère qui se détestent, ne se parlent pas, « l’enfant sage se suicide » : « Son père, sa mère éloignés au point qu’ils semblent ne s’être jamais rencontrés, deux maisons qui s’ignorent, deux lits sans vrai repos, deux gâteaux d’anniversaire pour fêter les 12 ans, deux mondes qui n’ont en commun qu’un passé enfui, interdit, Julien est l’enfant du partage. Il va de son père à sa mère, de sa mère à son père. Il sourit, il approuve, il veille sur l’un, il veille sur l’autre, il les garde, il ment chaque fois qu’il est nécessaire ».

L’absence de coparentalité entraine souvent des conséquences dramatiques sur l’enfant.

Marc Juston (magistrat honoraire), dit que la réalité est que le « non – respect de la coparentalité ne permet pas à l’enfant de se structurer, de se construire et de grandir normalement. »

Que dit la loi sur la coparentalité ?

La coparentalité est tout simplement les actes concrets des parents mettant en œuvre ENSEMBLES l’exercice en commun de l’autorité parentale :

Marc Juston précise « un père = une mère en termes de droits et de devoirs, pas de parent supérieur – pas de parent inférieur, pas de parent plus – pas de parent moins, mais égalité parentale en termes de droits et de devoirs. »

D’ailleurs, la loi précise parfaitement que la séparation est sans incidence sur les règles de l’exercice de l’autorité parentale.

En d’autres termes la coparentalité est la règle. Et la séparation n’a absolument aucune conséquence sur ce principe de coparentalité. Elle s’effectue avant, pendant et après une relation conjugale entre les parents. Le fait que les parents soient amoureux ou non n’a aucune incidence sur leur rôle d’équipe pour leur enfant. Qui exerce quelle partie de l’autorité parentale sur l’enfant ? Ca doit être discuté et validé ensembles même si concrètement l’un emmènera chez le médecin et l’autre s’occupera d’avantage de l’école. La loi leur demande de se tenir informé et de valider les décisions ensembles.

Mais quand un conflit parental s’introduit dans cette équipe coparentale, comment faire pour la faire perdurer ? D’autant plus, qu’on en veut à l’autre! Qu’on ne veut/peut plus se trouver dans la même pièce ou même s’adresser la parole sans que les cris, les menaces, les pleurs surgissent violemment… Comment être reconnu dans nos souffrances et agir ensemble dans l’intérêt de l’enfant ?

La construction d’une nouvelle coparentalité en médiation familiale

Nous professionnels de l’enfance, de l’adulte et de la famille, constatons très souvent, qu’il existe encore trop souvent :

  • Un parent principal et un parent secondaire, doté de droits moins étendus,
  • Un parent supérieur qui s’arroge tous les droits et un parent inférieur qui subit.

Régulièrement je rencontre des parents et des professionnels qui ne connaissent pas la différence entre les actes importants concernant la vie de l’enfant pour lesquelles les décisions doivent être pris à deux, et les actes usuels où les décisions peuvent être prises par le seul parent en garde de l’enfant.

Les parents ne connaissent pas réellement les conséquences positives et négatives de la mise en œuvre ou non de la coparentalité. En tant que professionnels de la famille, les médiateurs familiaux sont au fait du sujet.

Un outil de compréhension et d’accompagnement : la médiation familiale

La médiation familiale, avec des professionnels formés diplômés d’État, a pour objectifs de :

  • Mettre en place une véritable co parentalité dont les applications seront concrètes
  • Rétablir une réelle communication parentale et un apaisement dans l’intérêt de l’enfant.

Marc JUSTON dit très justement que : « Même si comme tout outil, la médiation familiale a ses limites et ne peut pas être utilisée dans toutes les situations, notamment les violences structurelles au sein d’un couple, elle a dans l’immense majorité des cas un impact majeur, en faisant prendre conscience aux parents que l’enfant doit être protégé du conflit parental. »

Il ajoute que : « L’utilisation de la médiation familiale démontre que c’est :

  • Un excellent outil de prévention et de protection de l’enfant, et,
  • Un outil majeur pour dé-conflictualiser les séparations et respecter la coparentalité. »

Les juristes ont la mission de « régler les questions de l’intérêt de l’enfant et de la coparentalité en technicien du droit » et les médiateurs familiaux celle de les traiter en « technicien du couple et de la famille ». L’approche des juges aux affaires familiales est législative, celle des médiateurs familiaux est humaniste.

« Il est certain que la Justice du XXIème siècle en est souvent encore à épuiser les parents, mais aussi et surtout les enfants dans le conflit de la séparation.

La médiation familiale qui permet aux parents de dialoguer et de communiquer, représente pour de plus en plus d’enfants dont les parents sont en conflit, une belle espérance. » (Marc JUSTON)

Conclusion

Pour conclure cet article, il me semble important de mettre en avant la complémentarité entre le travail de la justice et celui de la médiation familiale. En parallèle du cadre légal, il n’est d’autre endroit possible que de pouvoir aborder confidentiellement les sujets familiaux intimes tels que :

  • « Ça me fait mal de voir que mon enfant veut avoir le tee-shirt de mon ex pour s’endormir ! »
  • « Je n’ai pas confiance pour la sécurité de mon enfant quand je le lui confie »
  • « Comment dois-je réagir quand mon enfant me dit qu’il s’est fait punir par son père/sa mère pour une mauvaise note ? je n’ai pas les mêmes valeurs ! »

Marc JUSTON précise qu’une « coparentalité efficiente repose sur une communication apaisée, et la médiation familiale permet d’améliorer cette communication, en travaillant ce qui fait conflit. A force de le dire et de le redire sans se décourager, cette idée finira bien par s’installer dans la société pour la protection de l’enfant. »

 


Sources :

  • « Re-créer les liens familiaux » – Michèle Savourey
  • « La médiation familiale »- Sabrina De Dinechin
  • Article de Marc Juston « la coparentalité » – 30 octobre 2018. Magistrat honoraire – Formateur. Membre du HCFEA (section Famille).